DAJMA | Chapitre 25 – La Cité des Secrets
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Chapitre 25 – La Cité des Secrets

Qui êtes-vous ?
Thomas Magnus se réveilla dans une pièce aux murs de couleur verdâtre. Le sol était couvert d’un lino beige usé. Il ne connaissait pas cet endroit, mais devina très vite son usage. Il leva le regard vers l’unique fenêtre aux vitres constellées de chiures de mouche, protégées par un grillage et des barreaux. Il se redressa et fit basculer ses jambes sur le côté.
Des menottes pendaient, vides, au montant du lit. Il y avait une odeur dans l’air… Une odeur qu’il détestait. Mélange de produits aseptiques et d’odeurs corporelles… Une résonnance particulière, aussi.
Il se frotta les poignets, songeur. Dans ses rêves, il avait senti les bracelets de fer et entendu les tintements du métal contre le métal, quand il avait bougé. Qui les lui avait enlevés ?
Il se leva et alla jusqu’à la porte. C’était une porte de chambre d’hôpital, assez large pour laisser le passage à un lit médicalisé. Mais le lit où il s’était trouvé étendu n’était pas un lit d’hôpital. Il était fixe, avec un grillage d’acier pour tout sommier, et des pieds en métal blanc écaillé vissés au sol. Il baissa la poignée de la porte, s’attendant à trouver celle-ci verrouillée. Elle s’ouvrit, sans difficulté.
Il passa la tête dans le couloir. Vide.
Il emprunta le couloir, poussa la double porte qui le barrait à son extrémité sans rencontrer de résistance.
En regardant en arrière, il comprit qu’un pavé numérique et une serrure électronique protégeaient l’accès du couloir dont il venait de sortir. Désactivée. Au dessus de la porte, il y avait un panneau. Accès réservé. Interdit sans autorisation.
Là où il se trouvait à présent, il y avait une rumeur diffuse, des échos de pas lointains, de voix…
Pour la première fois, il examina sa tenue. Il portait un t-shirt blanc un peu grand pour lui et un pantalon de même couleur, pas de ceinture. Ses pieds étaient nus.
Il poussa la première porte venue et se trouva en haut d’un escalier carrelé. Il descendit rapidement deux volées de marche, ouvrit la porte qui lui faisait face et se trouva dans un couloir semblable à celui qu’il avait quitté un étage plus haut. Il entrouvrit une porte numérotée et regarda à l’intérieur. C’était une chambre avec un seul lit, et il y avait une jeune femme blonde adossée à deux oreillers. Elle tourna les yeux vers lui, de beaux yeux bleus.
– C’est toi, Marianne ? dit-elle.
Il la regarda sans répondre.
– Non, ce n’est pas toi. Qui êtes-vous ? demanda Gaëlle.
Il approcha d’un pas.
–  Vous ne me voyez pas ?
–  Non, j’ai eu un accident. J’ai perdu la vue.
–  Désolé, dit-il.
Il avisa un placard dans le mur et l’ouvrit.
Il contenait quelques affaires, mais rien qui puisse lui aller. Il referma le placard.
–  Qui êtes-vous ? lui demanda la jeune femme.
–  Personne, dit-il en ressortant.
La porte se referma doucement, et Gaëlle se sentit un peu rassurée. La présence avait disparu. Quelle fragilité ! Quelle dépendance ! L’homme aurait pu faire ce qu’il voulait d’elle. Il avait laissé un peu de son odeur dans la chambre. Etrangère, mais pas vraiment désagréable. Gaëlle se découvrait une sensibilité aux sons et aux odeurs qu’elle ignorait jusqu’à présent. Que pouvait-elle dire d’autre ? Il avait une voix plutôt jeune, même s’il est difficile de donner un âge à un quasi-murmure. Il était pieds nus. Ses vêtements ne faisaient aucun bruit. Pas de frottements, pas de tintements… Il n’était quand même pas entièrement nu ! Il devait porter un jogging ou en tous cas un vêtement en tissu souple. Pas de blouson, pas de clés… Il venait de l’intérieur de l’hôpital. Un aide-soignant qui s’était trompé de chambre ? Un patient ?
Cela ne servait à rien de spéculer. Elle se leva et alla jusqu’à la porte. Elle n’avait pas rêvé. Il l’avait bien refermée.
Elle retourna au lit presque sans hésitation, tâtonna quelques instants pour trouver le téléphone et composa le numéro de Marianne. Elle s’arrêta au dernier chiffre. Cela ne servait à rien de l’inquiéter. Le danger – si danger il y avait eu – était passé.
Mais il était temps qu’elle quitte cet endroit.
Où se trouvaient ses affaires ? Il lui fallut plus longtemps pour trouver le placard. Elle étala son imper et ses autres vêtements sur le lit.
Elle n’avait pas besoin de les voir pour s’habiller. Par contre, elle ne pouvait pas juger de l’état dans lequel ils se trouvaient. Tant pis. Elle eut un instant d’hésitation avant d’ôter son pyjama, et enfila précipitamment ses dessous. Son chemisier sentait la transpiration. Tant pis, Marianne ne lui avait pas encore ramené des affaires propres. Elle le boutonna en prenant son temps pour ne pas se tromper, vérifia que le col était bien disposé, et retourna au placard chercher ses chaussures. Elle tâtonna sans les trouver et commença à paniquer. Elle réfléchit et se baissa. Il y avait un autre petit placard, au niveau du sol. Il contenait ses chaussures et son sac. Elle souffla, soulagée et pas peu fière d’être arrivée à ses fins sans l’aide de personne.
Maintenant, il allait falloir qu’elle sorte de ce lieu, et c’était une autre paire de manche.
Elle sentit un souffle d’air et un déclic. La porte venait de s’ouvrir. – Mais qu’est-ce que tu fais ? s’écria Marianne dans son dos.
Gaëlle se retourna et lui fit face – en tous cas dans l’intention.
– Il est hors de question que je reste une minute de plus dans cet endroit, dit-elle. Je rentre chez moi.
– Très bien, dit Marianne sans hésiter. Tu veux bien que je vienne avec toi ?
Gaëlle sourit, soulagée.
– Oui, s’il te plaît. Ça me ferait très très plaisir. Et en plus, j’ai trop peur de ne pas pouvoir rentrer seule.
Marianne s’avança et la prit dans ses bras.

 

 

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